Il
y a quelques années, n'ayant plus d'argent ou presque et rien de
particulier à faire à terre, l'envie me prit de naviguer
encore un peu et de revoir le monde de l'eau. Quand je me sens des plis
amers autour de la bouche, quand je me surprends arrêté devant
une boutique de pompes funèbres ou suivant chaque enterrement que
je rencontre, je comprends qu'il est grand temps de prendre le large.
Ça remplace pour moi le suicide. Avec un grand geste, le philosophe
Caton se jette sur son épée, moi, tout bonnement, je prends
le bateau. Rien de surprenant à ça. Chaque homme, à
quelque période de sa vie, a eu la même soif d'océan
que moi.
Moby Dick, Herman Melville |